SUR LES ROUES
저자 : Gueune-Ok JOUH(주근옥)
시집명 : SUR LES ROUES
출판(발표)연도 : 2013
출판사 :
SUR LES ROUES
Gueune-Ok JOUH
Traduction par Jai-Yong SONG
L’annonce frappa nos oreilles
Dans le noir
Quand nous sommes entrés
Moi et ma femme
Dans la salle du théâtre
Pour voir une pièce
Chers citoyens voici l’avis
Trois criminels dangereux
Se sont infiltrés dans la ville
Ce sont des criminels politiques
Condamnés à mort
Ils se sont échappés cet après-midi
Par-dessus la muraille de la prison
Chers citoyens
Rentrez vite chez vous
Et fermez bien votre porte
Pour garder votre conscience saine
Soyez vigilants et retenez
Leur apparence et comportement
L’un d’eux homme d’âge moyen
A la physionomie chevaline
S’appelle Mah-gah
Il n’est ni gros ni mince
Mais d’une constitution forte
L’autre âgé de presque soixante ans
Aux grands yeux
Et à la tête chauve
Paraît cyniquement boulot
Son nom est Ouh-gah
Et le dernier type
D’un jeune de vingt ans
Semble fort beau et agile
Si vous les trouvez
Faites le savoir
Au poste de police
Ou au bureau du quartier le plus proche
Mêlé aux bruits de l’annonce
S’entend le vacarme d’une locomotive
Enfin s’ouvre une porte de fer
Aussitôt après on entend quelque chose tomber de haut
Et la foule chuchote dans l’ombre
Soudain s’allume une lampe de poche
Le son est coupé
La lumière grimpe lentement sur la scène
Et éclaire de droite à gauche
Elle est vraiment scintillante
Un homme frotte promptement la lampe de poche
Il s’éclaire la figure
Ah on voit là une équipe de service
Il se retire après avoir jeté un coup d’œil
Autour de lui
Le portail d’un wagon se ferme avec un bruit sonore
Les rires éclatent
La locomotive se met en route lentement
Son souffle s’amplifie
Puis s’étend harmonieusement
En s’atténuant
Sur la scène qui se révèle, baignée de brouillard
Mah-gah dit en entrant sur la scène
D’un pas traînant
Une citrouille est tombée avec la tige intacte
Ça c’est une citrouille de grande valeur pour moi
Et nous sommes sortis en disant
Non ce n’est pas cela
La citrouille est tout à fait ronde
Et beaucoup plus petite que ça
Mah-gah s’assied sur la valise
Il n’a pas encore décrassé
Ni épluché la peau
Qui exhale une odeur fétide
Va-t’en ! Va-t’en !
Ils se sont assis dos à dos
Où est donc notre pays natal ?
Ce n’est pas important ça
Notre âme réside toujours dans le pays natal
Nous voulons y aller pour attraper ça
Gouh-gah se remet debout soudain
Mah-gah et Ouh-gah se réveillent en sursaut
Et s’affaissent de nouveau
Gouh-gah a sans doute raison Non ?
Oui il semble
Gouh-gah a sûrement tort Non ?
Même s’il arrive là-bas
Il en reviendra un jour
Mais moi je vivrai toujours dans mon pays
Là-bas la rivière le vent et le ciel
Tout serait plus magnifique qu’ici
Car ici c’est un pays de mécanisme
Là-bas il n’y aurait pas Sa Majesté
Sa Majesté ? Qu’est-ce donc ?
Le mécanisme voilà Sa Majesté
Nous sommes tous ses sujets
Remboursez Sa Majesté de la vie de mon père
Qui a été condamné à prendre un poison mortel
Dénichez les ténèbres aux cheveux postiches
Et ses adeptes qui ont envahi ce terrain
Vous trois Mah-gah Ouh-gah et Gouh-ga
Tâchez de les découvrir en tous
Ces trois types se regardent
Et éclatent de rire en s’applaudissant
Soudain ils s’arrêtent
Ils s’accroupissent autour d’une valise
Ils roulent sur eux-mêmes se séparent et se réunissent à nouveau
Le pays est-il encore loin ?
Le pays se trouve où l’obscurité se dissipe
On dit que c’est très loin
Mais je n’en sais pas plus long
Car je n’y ai encore jamais été
Depuis que j’en suis parti
Le train s’arrêtera bientôt là-bas
Non ! la prochaine c’est une gare provisoire
Toutefois ce train s’arrêtera prochainement
Peut-être montera une femme enceinte
Nous l’accompagnerons
Non on ne doit pas faire comme ça
Il la poussera du pied si elle veut monter
Le compartiment est assez large
Il a beaucoup de places vides
Pourquoi ne veux-tu pas qu’elle monte ?
Tu ne sais vraiment pas ?
Si cette femme enceinte accouche
Le nouveau-né criera
Et cela m’agacera
Je me boucherai les oreilles
Oui j’étais comme ça moi aussi
Je pleurais d’une tristesse sans fin
J’ai même envie de pleurer encore
Alors nous serons arrêtés
Tu l’as vu tout à l’heure
Ce type que Sa Majesté a envoyé
Il a endossé un vêtement accordé par Sa Majesté
Une fois arrêtés, on aura les chevilles entravées
Par des chaînes de fer
Il regarde Mah-gah et Ouh-gah tour à tour
J’ai mal aux chevilles je ne suis pas guéri
Attention cette fois
Tu seras peut-être attaché par le cou
Huh Huh mon âme vit dans mon pays natal
Ce n’est pas vrai c’est faux
Je me tairai pour toujours
Tout le monde s’élève contre ma parole
Je me dois de fermer la bouche
Peut-être tant mieux en ce cas
Ohé Gouh-gah ne t’en fais pas
Les ténèbres sont longues et courtes à la fois
Le matin s’illuminera au bout de cette zone
C’est là-bas notre pays natal
Le train roule-t-il vers la capitale ?
Va-t-il dans la direction contraire ?
Quels idiots ! ça roule tout simplement
Le soleil se lève sur la montagne
Non il dort au fond de la mer
Il se trouve partout
Sur la vitre et dans l’eau de l’assiette
Oui le soleil du matin se tient
Au bout de l’ombre
C’est vrai ça c’est vrai
Ils tournent en rond tous trois
Ils tournent de plus en plus vite
Ils tombent par terre en tournant le plus vite
C’est le langage du corps pour le plaisir
Ils montent sur la valise en criant
On s’ennuie terriblement
On a soif
L’air est impur
Ouvre la porte
L’un d’eux lance un regard menaçant
Comment ? Non !
Il fait plus noir au-dehors
On deviendra aveugle
Quand vient la nuit
Personne ne nous jettera de pièce de monnaie
Quand même ouvre la porte un peu
On étouffe trop
Respire beaucoup plus profondément
Ouvre les yeux plus grand
Un peu de patience s’il te plaît
C’est le meilleur remède
Gouh-Gah respire profondément
Mah-gah et Houh-gah expirent longuement
Comme s’ils s’étaient absorbés par Gouh-gah
Ça n’ira pas comme ça
Ouvre la porte un peu
Houh-gah est superbe
Non ! non !
Mais un peu de générosité
Gouh-gah court ouvrir la porte de derrière
Mah-gah le prend par la cheville
Il se renverse et se redresse encore
Il réapparaît juste sur le devant de la scène
Mah-gah le suit en courant
Houg-gah le prend par la cheville
Ils culbutent tous deux
Ils se battent tantôt dessus tantôt dessous
Gouh-gah s’efforce d’ouvrir
La porte de l’imagination
Se trouvant du côté de la salle
Mais la porte ne s’ouvre pas
Il prend la poignée d’une porte et se tient en équilibre
La porte s’ouvre doucement
Soudain la locomotive souffle sourdement
Le sifflet d’alarme s’entend toujours
Mah-gah et Houg-gah se tiennent par la hanche
Ils se débattent en poussant des cris
Ferme vite la porte
Attends un moment
Puisque c’est déjà ouvert
C’est vraiment étouffant
Ca ira mieux bientôt
Nous n’avons plus d’espérance
Nous sombrerons dans les ténèbres
Nous serons aveugles aussi
Ferme la porte ! ferme vite !
Les ténèbres deviennent quelques fois lumière
Moi j’aimerais bien y aller
On peut descendre du train ?
Fais comme tu veux
Houh-gah lâche la hanche de Mah-gah
Et saute vers nous pour dire
Non ça va pas comme ça
Le pays natal est encore loin
Houh-gah tire Gouh-gah vers lui
Mah-gah court vite
Pour fermer le portail
Les sifflets baissent d’intensité
Et se répandent en son harmonieux
Houh-gah tourne autour de Gouh-gah
Qui est assis sur la valise
La tête entre les genoux
C’est une affaire extraordinaire
Il faut l’analyser
Il faut la creuser à fond
Mah-gah tourne en rond lui aussi
D’où est-il venu ?
Qui l’a envoyé ici ?
Qui a orchestré ce complot ?
S’agit-il d’un manque quelconque?
Est-ce un problème d’argent ?
Ou de passion aveugle ?
Comme c’est honteux
Comme c’est ignoble
Comme c’est lâche
Très très vulgaire
C’en est assez assez
Toi tu me vois bien ?
Oui je te vois bien mais pourquoi ?
Il tourne toujours c’est bizarre
L’autre tourne lui aussi et dit
C’est singulier ta danse
Nous ne sommes pas aveugles
C’est normal d’être aveugle
Il n’y a rien de normal
C’est normal ce qui est fait
On peut tout faire maintenant
Est-ce vrai ?
Tout sera bien tout sera bien fait
On a failli les perdre de vue
On faisait une enquête sur leur crime
Il se tient debout et dit oui
Comment est-il ?
Ca c’est une souris
Non c’est plutôt un cochon
Mais il fait semblant d’être gentil
Il cache son hypocrisie sous la boule de suif
Et demande d’un ton hideux c’est toi ?
Je ne me rappelle pas bien
Je fais tant de connaissance
Oh oui c’est fort possible
Ses prunelles reflètent le désir charnel
Mlle Kim tu me parais très ravissante ce soir
Laisse-moi te caresser les mains
Elle le repousse de loin
Comment ça ? suis-je trop vieux ?
Ouf c’est fort hideux
Espèce d’ours
Espèce de renard
Il vient me trouver
Juste au moment du comble de plaisir
C’était comme ça tout à l’heure
C’est toujours comme ça
Il venait sans avoir laissé de traces
Et disparaissait comme un souffle de vent
Il faut le mettre au joug
Ou plutôt faut-il l’étrangler
Il demandera pardon en se frottant les mains
Il se frottera les pieds aussi si les mains s’usent ?
Et après ?
Il pleurera en larmoyant
Ça sera amusant
Ca vous apprendra
Allons allons donc l’arrêter
Remarquez qu’il est très fort
Nous ne pourrons pas le prendre de force
Il a fait du judo
Il a fait du Taiguendo
Il a fait aussi du catch
Ce n’est pas le moment de discuter
Il vaut mieux amener Gouh-gah avec nous
Oui ça c’est vrai
Trois seront plus fort que deux
Ben il y aura bientôt le dernier moment
Oui ce sera ainsi fini
Ils se frottent des mains très satisfaits
Ils regardent subitement Gouh-gah
Qui s’est endormi
Houh-gah s’approche doucement
Et écoute son souffle
Ah il dort d’un sommeil profond
Peut-être que rêve-t-il ?
Il parle tout seul
Ou alors on le laisse tranquille ?
Non il faut le réveiller
Mais il fait un beau rêve
Un rêve merveilleux
Peut-être
Regarde-le
Il observe Gouh-gah
Et scrute sa figure
Non, ce n’est pas cela
Vas-y! Vas-y! réveille-le !
Il doit être près de nous
Nous devons prendre les devants
Débarrassons-nous de ce type avant qu’il ne nous laisse
Le temps de nous battre en griffant
D’accord mais comment le réveiller ?
Ne t’en fais pas ! c’est moi qui le réveille
On n’ a qu’à appuyer sur un bouton
Mah-gah s’accroupit
Et lance ses regards sur la figure de Mah-gah
Ca ne va pas comme cela
Il faudra bien discuter
De la méthode, ainsi que du procédée
On doit bien réfléchir
Il faut être plus prudent
Il faut respecter l’opinion publique
Les intérêts et les hommes sans doute
Houh-gah se laisse prendre par une pensée
Mah-gah regarde Houg-gah en face
Laisse-moi faire c’est moi qui vais le tenter
Non laisse-moi à moi je vais faire cela
Moi j’en suis sûr
Non à moi
Non à moi
Pousse-toi pousse-toi
Ils repoussent l’un l’autre
Soudain ils s’entassent en une boule
Et tombent sur le corps de Gouh-gah
Gouh-gah s’écrie tout à coup de toute sa voix
Il saute encore et se sauve
Il tourne en rond sur la scène
Et puis se tient dans un coin
Pour regarder ces deux types
Les yeux pleins d’horreur
Tous deux se lèvent et se dirigent vers Gouh-gah
Ne viens pas vers moi ou je tire sur toi
Il feint de tirer un revolver
Tenez-vous là
Mah-gah et Houg-gah se sentent bêtement désorientés
Vous avez tramé une intrigue pour me tuer
Je le sais fort bien
Houh-gah tu m’étranglais le bras
Mah-gah tu menaçais mon cou
Avec un couteau aiguisé
Ton corps était trempé tout entier de sueur froide
Tu auras peut-être tressailli d’urine froide
Tu implorais la vie lâchement
Non je demandais
Si la peine durerait longtemps
Toi tu n’es pas du tout peureux
C’est facile
De couper la tête en un instant
On aurait dû arracher les prunelles
Pour que la douleur durât éternellement
On aurait dû couper les doigts aussi
J’ai été tué ligoté par une corde
Je suis tombé terriblement ensanglanté
Il s’approche et dit que c’était un rêve
Houh-gah lui aussi s’exclame
Que tu es idiot ! c’est vraiment un rêve
Et leur ordonne de s’arrêter là
Halte ou je vais tirer
J’ai encore une blessure sanglante
Je me vois bien la figure débordant de sang
Nous ne voulons pas te tuer
Nous voulons simplement un service de toi
Nous allions arrêter un criminel
Quel salaud que celui-là
Gouh-gah toi dis-moi
Mah-gah non seulement moi
Non seulement nous tous
Houh-gah s’approche
C’est notre ennemi l’ennemi de tous
Mah-gah s’approche et dit
Qu’il est notre ennemi
C’est une grande victoire
De l’attraper sans doute
C’est aussi une résolution définitive
Tous deux se trouvent maintenant
Plus près de Gouh-gah
Ses mains se dérobent sous lui
Ils s’embrassent
Ils avancent vers le centre de la scène
Le son de tambour retentit juste en ce moment
Tantôt ils se dispersent
Tantôt ils se rassemblent
C’est une garde d’honneur
Ils tournent encore autour de la scène
Pour s’asseoir sur la valise
Nous avons fouillé partout et partout
Ce n’est plus à notre portée
Il faudrait bien réfléchir
Il vaut mieux imiter des professeurs distingués
Idiots que vous êtes !
Vous n’avez pas fouillé là où il le fallait
Si nous avons fouillé dans tous les coins
Ce n’est pas ma faute
Même si j’ai omis de fouiller ailleurs
C’est la même chose pour toi
Gouh-gah tu ne portes toujours dans ta poche
Qu’un manuel
C’est vrai Gouh-gah portait toujours
Le manuel de la loi et de la philosophie
L’un dans la poche droite et l’autre dans la gauche
J’ai bien vu cela
Non tu as tort
La vérité se trouve à côté de nous
Ah ce mot aussi se trouve dans le manuel
Silence
Et bien écoute …
C’en est assez du discours du manuel
Non ce n’est pas cela
Mah-gah et Houh-gah rient face à face
Allons ailleurs pour parler
Qu’as-tu donc ?
Suivez-moi s’il vous plaît
Gouh-gah emmène les deux autres
Derrière la scène
Il chuchote quelques mots à leurs oreilles
Tu comprends toi ?
Tous deux hochent la tête
Gouh-gah en désignant la gauche
Mah-gah toi tourne par là
Et désignant de nouveau la droite
Houh-gah toi tourne de ce côté
Moi j’irai tout droit
Attention et ne perds pas courage
N’aie plus de peur
Es-tu prêt ?
Ils hochent cette fois la tête
Alors c’est le moment de commencer
Tous trois s’approchent de la valise
Tout doucement
A chaque pas sonne
Le son funeste du tombeau
Ils sont rassemblés autour de la valise
Ils sont prêts à attaquer
Gouh-gah va ouvrir la valise
La scène devient obscure tout d’un coup
Et la lumière les prend dans un cercle
Ils prennent tous des choses dans la valise
Mah-gah en retire des vêtements pour homme
Houh-gah en tire des vêtements pour femme
Celui-ci se masque et cherche un porte-à-chefs
Ils éclatent de rire en bondissant de joie
Ils tournent en rond en piétinant
Ils accélèrent de plus en plus vite
Ils tombent par terre hors de zone lumineuse
Silence
La scène s’éclaircit de nouveau
L’un deux se relève d’un air curieux
L’autre demande : penses-tu ?
Oui c’est ça
J’étais vraiment essoufflé l’autre jour
Moi aussi
Moi aussi
C’est que nous l’avons entièrement supprimé
Non nous ne l’avons pas supprimé
Il s’est sauvé
Après s’être déshabillé
Quand même c’est la même chose
Il n’y a même pas de coins pour se cacher
Fuyons ! nous l’avons chassé
Mais s’il revient qu’en diras-tu ?
Nous aurions dû supprimer la possibilité même de son retour
La possibilité implique aussi l’impossibilité même
Quel soin superflu ! t’en fais pas !
Gouh-gah a raison
Uniquement grâce à lui
Nous serons joyeux jusqu’au bout
Il n’y a pas d’invasion
Ni cabale discrète
Ni dessous de l’affaire
Rien du tout
Les trois se serrent la main
Bravo ! bravo ! bravo !
Ils lèvent les bras très en haut
Dis donc
Essayons de mettre ce vêtement
Bonne idée !
Si jamais il revient
Il ne pourra pas nous reconnaître
Et comment mettre ça ?
Idiot mets-le comme je le fais
Après avoir feint de mettre le vêtement
Il dit oh Gouh-gah toi
Tu lui diras comment le mettre
Oui c’est moi qui vais essayer
Fais comme je te montre
Enlève d’abord la veste
Ah c’est un chemisier pour femme boutonnée derrière
Mah-gah essaye lui aussi
Il met les vêtements à l’envers
Gouh-gah boutonne d’abord la veste de Houh-gah
Et ensuite celle de Mah-gah
Houh-gah met la jupe
Mah-gah observe l’homme de Houh-gah
Essayant de mettre le pantalon
Et il manque de mettre les deux pieds dans la même jambe
Il trébuche
Il tombe
Il se lève pour essayer encore une fois
Houh-gah et Gouh-gah le soutiennent
Pour qu’il mette le pantalon correctement
Cette fois les boutons se trouvent du côté du dos
Ca c’est assez drôle
C’est bien quand même
Est-ce vraiment bien mis?
Il l’examine de tous côtés
Ça te va bien ?
Mais tu n’as pas de vêtements
Oui c’est vrai
Pas de problème cela te servira
Gouh-gah se masque
Ca va bien comme ça ?
Gouh-gah gémit de douleur tout à coup
Tous deux tombent de frayeur
Il se déshabille et demande comment il est
Ils se lèvent et disent qu’il est beau
Il leur dit en montrant le porte-à-chefs
Que c’est fort utilisable
On peut ouvrir n’importe quelle porte avec ça
Demande-le-moi si tu en as besoin !
Ah oui d’accord
Il a dû se dépêcher
Il a laissé tomber ça
Montre-le-moi !
Non demande-le-moi quand tu en as besoin
Ma femme sera fort contente si je le lui donne
Peut-être elle ne pourra pas dormir tellement elle sera heureuse
C’est pareil pour moi
Mah-gah s’est laissé prendre par une pensée
Houh-gah aussi s’est laissé en traîner par une pensée
La vitesse de la locomotive ralentit peu à peu
On est arrivé à la gare-baraque
On arrivera bientôt au pays natal
Enfin nous reviendrons à nous-mêmes
Mais il y a encore d’autres gares-baraques
Comment ? idiot !
En leur montrant encore le porte-à-chefs
T’es devenu complètement fou pour ça
Tu te passionnes aussi pour ces vêtements
Déshabille-toi vite !
Je veux les donner à ma femme
Je n’ai pas de vêtements de bonne qualité
Je vais donc les mettre moi-même
Fort bien donnez toutes ces clefs
A qui voudra se déshabiller
Houh-gah examine l’humeur de Mah-gah
Mah-gah épie nos propres réactions de nous-mêmes
Tu ne veux pas ça ?
Il élève en haut le porte-à-chefs
Houh-gah tend la main
Mah-gah lui aussi
Gouh-gah élève la main plus haut
Je veux le donner à celui qui se déshabille le premier`
Bientôt le train s’est arrêté
C’est là la gare provisoire
La prochaine c’est notre pays natal
Les deux reculent à la dérobée
Jusqu'au portail de fer pour y s’appuyer
Ils font un même geste
Ils regardent Gouh-gah hostilement
Je vous dis pour la dernière fois
Que je promets de donner ce porte-clefs
A qui voudra se déshabiller
Les deux types ouvrent vite le portail
Non ! Non ! Non ! Non !
Je dois marcher pieds nus
Je vais marcher moi aussi vers le pays natal
Sans souliers
Ils sautent dehors
Gouh-gah s’affaisse sans force
Les deux bras ballant faiblement
Gouh-gah se révolte en vain
Soudain qu’il se dirige vers les voyeurs
Mesdames et messieurs !
Les deux criminels échappés seront arrêtés
Cadenassés par la police
Ils seront torturés à l’électricité
Ils seront suspendus à l’envers
Leurs jambes et reins seront cassés
Enfin ils seront incapables d’érection
Peut-être ils auront des trous au cœur en fuyant
Ils s’évaderont en suivant la voie ferrée
Ne connaissant ni allée ni sentier pour la traverser
Peut-être les roues du train les écraseront-ils
Ah quelle mort insignifiante !
Qui d’entre vous voudra aller au pays natal avec moi ?
La place est vaste
On y arrivera comme ça plus vite qu’en marchant
On fera un beau rêve non ?
Il s’approche d’une femme
Madame où est-ce que vous allez ?
Il dit en montrant le porte-à-chefs
On peut ouvrir n’importe quelle porte avec ça
Et puis en montrant le masque
On peut se cacher complètement la figure
Voulez-vous y aller avec moi ?
Quand on arrivera à la patrie
Votre femme reviendra à elle
Voulez-vous… ?
Pas de réponse
Pauvre homme découragé
Il se dégage de la salle du théâtre
Pour monter de nouveau sur la scène
Il dit en se tournant vers la salle
Vous avez laissé passer la dernière chance
Cette chance si rare
Finalement il tombe par terre
Le sentiment de solitude le saisit
Il se débat de douleur
Il se lève tout à coup pour se masquer
Il commence à danser
Juste à ce moment-là
Des spectateurs montent sur la scène
Un à un ou deux par deux
Ils se mettent à danser avec lui
La scène est bientôt remplie de spectateurs
La danse festive atteint son paroxysme
Et ils tombent tous ensemble
La scène sombre alors soudainement dans la nuit
Un moment après
Une lampe de poche éclaire la scène
C’est un contrôleur de train
Il aperçoit la valise ouverte
Et illumine les quatre coins de la salle
Mais il ne découvre pas
Ceux qui se sont abattus là
Il ferme la valise
Il la dépose où elle était avant
Il se retire après avoir éclairé la scène
Le portail de fer se clôt en grinçant
La locomotive se met doucement en route
Les sifflets atteignent leur apogée
En harmonie avec l’annonce
Qui frappait leurs oreilles au commencement
Avant-propos
Ce recueil de poésie est fondée sur S+7(substantif + septième de Harmonie) de Jean Lescure et sémiotique d'Algirdas Julien Greimas. Par conséquent elle est également sur Phoria avec Aporia. C'est-à-dire, c'est poésie de la valence qui est interaction d'induction avec la déduction, et de perception avec la catégorie thymique. Il est comme le minimalisme ou l'OuLiPo. Cette action discursive est montrée sur la mise en scène, il sera interprétée globalement par des lecteurs.
Gueune-ok JOUH
Gueune-Ok JOUH, né en Corée, a fait ses études à l’Université de Chung-Nam et soutenu une thèse de doctorat: L’étude de la modernité dans la poésie moderne coréenne, à l’Université de Daejeon. Il est reconnu surtout comme poète qui recherche la possibilité de la nouvelle poésie épique. Il a publié de nombreux recueils de poèmes: Le crépuscule sur le dos, Le tonnerre et la rose et Pour désherber. Il a été instructeur de l'Université de Daejeon.
Jai-Yong SONG, traducteur de Sur les roues et Sur le pont de Gueune-Ok JOUH, a fait ses études de langue et littérature françaises à l’Université de Séoul et soutenu une thèse de doctorat à l’Université Paul Valéry Montpellier III. Ses travaux principaux portent sur les recherches de la critique littéraire française. Il a traduit également en coréen de nombreux ouvrages littéraires françaises, notamment de Hugo, Apollinaire, Breton, Maurois, etc. Il est professeur honoré à l’université de Chung-Nam.
http://www.illustrer.net/
Gueune-Ok JOUH
Traduction par Jai-Yong SONG
L’annonce frappa nos oreilles
Dans le noir
Quand nous sommes entrés
Moi et ma femme
Dans la salle du théâtre
Pour voir une pièce
Chers citoyens voici l’avis
Trois criminels dangereux
Se sont infiltrés dans la ville
Ce sont des criminels politiques
Condamnés à mort
Ils se sont échappés cet après-midi
Par-dessus la muraille de la prison
Chers citoyens
Rentrez vite chez vous
Et fermez bien votre porte
Pour garder votre conscience saine
Soyez vigilants et retenez
Leur apparence et comportement
L’un d’eux homme d’âge moyen
A la physionomie chevaline
S’appelle Mah-gah
Il n’est ni gros ni mince
Mais d’une constitution forte
L’autre âgé de presque soixante ans
Aux grands yeux
Et à la tête chauve
Paraît cyniquement boulot
Son nom est Ouh-gah
Et le dernier type
D’un jeune de vingt ans
Semble fort beau et agile
Si vous les trouvez
Faites le savoir
Au poste de police
Ou au bureau du quartier le plus proche
Mêlé aux bruits de l’annonce
S’entend le vacarme d’une locomotive
Enfin s’ouvre une porte de fer
Aussitôt après on entend quelque chose tomber de haut
Et la foule chuchote dans l’ombre
Soudain s’allume une lampe de poche
Le son est coupé
La lumière grimpe lentement sur la scène
Et éclaire de droite à gauche
Elle est vraiment scintillante
Un homme frotte promptement la lampe de poche
Il s’éclaire la figure
Ah on voit là une équipe de service
Il se retire après avoir jeté un coup d’œil
Autour de lui
Le portail d’un wagon se ferme avec un bruit sonore
Les rires éclatent
La locomotive se met en route lentement
Son souffle s’amplifie
Puis s’étend harmonieusement
En s’atténuant
Sur la scène qui se révèle, baignée de brouillard
Mah-gah dit en entrant sur la scène
D’un pas traînant
Une citrouille est tombée avec la tige intacte
Ça c’est une citrouille de grande valeur pour moi
Et nous sommes sortis en disant
Non ce n’est pas cela
La citrouille est tout à fait ronde
Et beaucoup plus petite que ça
Mah-gah s’assied sur la valise
Il n’a pas encore décrassé
Ni épluché la peau
Qui exhale une odeur fétide
Va-t’en ! Va-t’en !
Ils se sont assis dos à dos
Où est donc notre pays natal ?
Ce n’est pas important ça
Notre âme réside toujours dans le pays natal
Nous voulons y aller pour attraper ça
Gouh-gah se remet debout soudain
Mah-gah et Ouh-gah se réveillent en sursaut
Et s’affaissent de nouveau
Gouh-gah a sans doute raison Non ?
Oui il semble
Gouh-gah a sûrement tort Non ?
Même s’il arrive là-bas
Il en reviendra un jour
Mais moi je vivrai toujours dans mon pays
Là-bas la rivière le vent et le ciel
Tout serait plus magnifique qu’ici
Car ici c’est un pays de mécanisme
Là-bas il n’y aurait pas Sa Majesté
Sa Majesté ? Qu’est-ce donc ?
Le mécanisme voilà Sa Majesté
Nous sommes tous ses sujets
Remboursez Sa Majesté de la vie de mon père
Qui a été condamné à prendre un poison mortel
Dénichez les ténèbres aux cheveux postiches
Et ses adeptes qui ont envahi ce terrain
Vous trois Mah-gah Ouh-gah et Gouh-ga
Tâchez de les découvrir en tous
Ces trois types se regardent
Et éclatent de rire en s’applaudissant
Soudain ils s’arrêtent
Ils s’accroupissent autour d’une valise
Ils roulent sur eux-mêmes se séparent et se réunissent à nouveau
Le pays est-il encore loin ?
Le pays se trouve où l’obscurité se dissipe
On dit que c’est très loin
Mais je n’en sais pas plus long
Car je n’y ai encore jamais été
Depuis que j’en suis parti
Le train s’arrêtera bientôt là-bas
Non ! la prochaine c’est une gare provisoire
Toutefois ce train s’arrêtera prochainement
Peut-être montera une femme enceinte
Nous l’accompagnerons
Non on ne doit pas faire comme ça
Il la poussera du pied si elle veut monter
Le compartiment est assez large
Il a beaucoup de places vides
Pourquoi ne veux-tu pas qu’elle monte ?
Tu ne sais vraiment pas ?
Si cette femme enceinte accouche
Le nouveau-né criera
Et cela m’agacera
Je me boucherai les oreilles
Oui j’étais comme ça moi aussi
Je pleurais d’une tristesse sans fin
J’ai même envie de pleurer encore
Alors nous serons arrêtés
Tu l’as vu tout à l’heure
Ce type que Sa Majesté a envoyé
Il a endossé un vêtement accordé par Sa Majesté
Une fois arrêtés, on aura les chevilles entravées
Par des chaînes de fer
Il regarde Mah-gah et Ouh-gah tour à tour
J’ai mal aux chevilles je ne suis pas guéri
Attention cette fois
Tu seras peut-être attaché par le cou
Huh Huh mon âme vit dans mon pays natal
Ce n’est pas vrai c’est faux
Je me tairai pour toujours
Tout le monde s’élève contre ma parole
Je me dois de fermer la bouche
Peut-être tant mieux en ce cas
Ohé Gouh-gah ne t’en fais pas
Les ténèbres sont longues et courtes à la fois
Le matin s’illuminera au bout de cette zone
C’est là-bas notre pays natal
Le train roule-t-il vers la capitale ?
Va-t-il dans la direction contraire ?
Quels idiots ! ça roule tout simplement
Le soleil se lève sur la montagne
Non il dort au fond de la mer
Il se trouve partout
Sur la vitre et dans l’eau de l’assiette
Oui le soleil du matin se tient
Au bout de l’ombre
C’est vrai ça c’est vrai
Ils tournent en rond tous trois
Ils tournent de plus en plus vite
Ils tombent par terre en tournant le plus vite
C’est le langage du corps pour le plaisir
Ils montent sur la valise en criant
On s’ennuie terriblement
On a soif
L’air est impur
Ouvre la porte
L’un d’eux lance un regard menaçant
Comment ? Non !
Il fait plus noir au-dehors
On deviendra aveugle
Quand vient la nuit
Personne ne nous jettera de pièce de monnaie
Quand même ouvre la porte un peu
On étouffe trop
Respire beaucoup plus profondément
Ouvre les yeux plus grand
Un peu de patience s’il te plaît
C’est le meilleur remède
Gouh-Gah respire profondément
Mah-gah et Houh-gah expirent longuement
Comme s’ils s’étaient absorbés par Gouh-gah
Ça n’ira pas comme ça
Ouvre la porte un peu
Houh-gah est superbe
Non ! non !
Mais un peu de générosité
Gouh-gah court ouvrir la porte de derrière
Mah-gah le prend par la cheville
Il se renverse et se redresse encore
Il réapparaît juste sur le devant de la scène
Mah-gah le suit en courant
Houg-gah le prend par la cheville
Ils culbutent tous deux
Ils se battent tantôt dessus tantôt dessous
Gouh-gah s’efforce d’ouvrir
La porte de l’imagination
Se trouvant du côté de la salle
Mais la porte ne s’ouvre pas
Il prend la poignée d’une porte et se tient en équilibre
La porte s’ouvre doucement
Soudain la locomotive souffle sourdement
Le sifflet d’alarme s’entend toujours
Mah-gah et Houg-gah se tiennent par la hanche
Ils se débattent en poussant des cris
Ferme vite la porte
Attends un moment
Puisque c’est déjà ouvert
C’est vraiment étouffant
Ca ira mieux bientôt
Nous n’avons plus d’espérance
Nous sombrerons dans les ténèbres
Nous serons aveugles aussi
Ferme la porte ! ferme vite !
Les ténèbres deviennent quelques fois lumière
Moi j’aimerais bien y aller
On peut descendre du train ?
Fais comme tu veux
Houh-gah lâche la hanche de Mah-gah
Et saute vers nous pour dire
Non ça va pas comme ça
Le pays natal est encore loin
Houh-gah tire Gouh-gah vers lui
Mah-gah court vite
Pour fermer le portail
Les sifflets baissent d’intensité
Et se répandent en son harmonieux
Houh-gah tourne autour de Gouh-gah
Qui est assis sur la valise
La tête entre les genoux
C’est une affaire extraordinaire
Il faut l’analyser
Il faut la creuser à fond
Mah-gah tourne en rond lui aussi
D’où est-il venu ?
Qui l’a envoyé ici ?
Qui a orchestré ce complot ?
S’agit-il d’un manque quelconque?
Est-ce un problème d’argent ?
Ou de passion aveugle ?
Comme c’est honteux
Comme c’est ignoble
Comme c’est lâche
Très très vulgaire
C’en est assez assez
Toi tu me vois bien ?
Oui je te vois bien mais pourquoi ?
Il tourne toujours c’est bizarre
L’autre tourne lui aussi et dit
C’est singulier ta danse
Nous ne sommes pas aveugles
C’est normal d’être aveugle
Il n’y a rien de normal
C’est normal ce qui est fait
On peut tout faire maintenant
Est-ce vrai ?
Tout sera bien tout sera bien fait
On a failli les perdre de vue
On faisait une enquête sur leur crime
Il se tient debout et dit oui
Comment est-il ?
Ca c’est une souris
Non c’est plutôt un cochon
Mais il fait semblant d’être gentil
Il cache son hypocrisie sous la boule de suif
Et demande d’un ton hideux c’est toi ?
Je ne me rappelle pas bien
Je fais tant de connaissance
Oh oui c’est fort possible
Ses prunelles reflètent le désir charnel
Mlle Kim tu me parais très ravissante ce soir
Laisse-moi te caresser les mains
Elle le repousse de loin
Comment ça ? suis-je trop vieux ?
Ouf c’est fort hideux
Espèce d’ours
Espèce de renard
Il vient me trouver
Juste au moment du comble de plaisir
C’était comme ça tout à l’heure
C’est toujours comme ça
Il venait sans avoir laissé de traces
Et disparaissait comme un souffle de vent
Il faut le mettre au joug
Ou plutôt faut-il l’étrangler
Il demandera pardon en se frottant les mains
Il se frottera les pieds aussi si les mains s’usent ?
Et après ?
Il pleurera en larmoyant
Ça sera amusant
Ca vous apprendra
Allons allons donc l’arrêter
Remarquez qu’il est très fort
Nous ne pourrons pas le prendre de force
Il a fait du judo
Il a fait du Taiguendo
Il a fait aussi du catch
Ce n’est pas le moment de discuter
Il vaut mieux amener Gouh-gah avec nous
Oui ça c’est vrai
Trois seront plus fort que deux
Ben il y aura bientôt le dernier moment
Oui ce sera ainsi fini
Ils se frottent des mains très satisfaits
Ils regardent subitement Gouh-gah
Qui s’est endormi
Houh-gah s’approche doucement
Et écoute son souffle
Ah il dort d’un sommeil profond
Peut-être que rêve-t-il ?
Il parle tout seul
Ou alors on le laisse tranquille ?
Non il faut le réveiller
Mais il fait un beau rêve
Un rêve merveilleux
Peut-être
Regarde-le
Il observe Gouh-gah
Et scrute sa figure
Non, ce n’est pas cela
Vas-y! Vas-y! réveille-le !
Il doit être près de nous
Nous devons prendre les devants
Débarrassons-nous de ce type avant qu’il ne nous laisse
Le temps de nous battre en griffant
D’accord mais comment le réveiller ?
Ne t’en fais pas ! c’est moi qui le réveille
On n’ a qu’à appuyer sur un bouton
Mah-gah s’accroupit
Et lance ses regards sur la figure de Mah-gah
Ca ne va pas comme cela
Il faudra bien discuter
De la méthode, ainsi que du procédée
On doit bien réfléchir
Il faut être plus prudent
Il faut respecter l’opinion publique
Les intérêts et les hommes sans doute
Houh-gah se laisse prendre par une pensée
Mah-gah regarde Houg-gah en face
Laisse-moi faire c’est moi qui vais le tenter
Non laisse-moi à moi je vais faire cela
Moi j’en suis sûr
Non à moi
Non à moi
Pousse-toi pousse-toi
Ils repoussent l’un l’autre
Soudain ils s’entassent en une boule
Et tombent sur le corps de Gouh-gah
Gouh-gah s’écrie tout à coup de toute sa voix
Il saute encore et se sauve
Il tourne en rond sur la scène
Et puis se tient dans un coin
Pour regarder ces deux types
Les yeux pleins d’horreur
Tous deux se lèvent et se dirigent vers Gouh-gah
Ne viens pas vers moi ou je tire sur toi
Il feint de tirer un revolver
Tenez-vous là
Mah-gah et Houg-gah se sentent bêtement désorientés
Vous avez tramé une intrigue pour me tuer
Je le sais fort bien
Houh-gah tu m’étranglais le bras
Mah-gah tu menaçais mon cou
Avec un couteau aiguisé
Ton corps était trempé tout entier de sueur froide
Tu auras peut-être tressailli d’urine froide
Tu implorais la vie lâchement
Non je demandais
Si la peine durerait longtemps
Toi tu n’es pas du tout peureux
C’est facile
De couper la tête en un instant
On aurait dû arracher les prunelles
Pour que la douleur durât éternellement
On aurait dû couper les doigts aussi
J’ai été tué ligoté par une corde
Je suis tombé terriblement ensanglanté
Il s’approche et dit que c’était un rêve
Houh-gah lui aussi s’exclame
Que tu es idiot ! c’est vraiment un rêve
Et leur ordonne de s’arrêter là
Halte ou je vais tirer
J’ai encore une blessure sanglante
Je me vois bien la figure débordant de sang
Nous ne voulons pas te tuer
Nous voulons simplement un service de toi
Nous allions arrêter un criminel
Quel salaud que celui-là
Gouh-gah toi dis-moi
Mah-gah non seulement moi
Non seulement nous tous
Houh-gah s’approche
C’est notre ennemi l’ennemi de tous
Mah-gah s’approche et dit
Qu’il est notre ennemi
C’est une grande victoire
De l’attraper sans doute
C’est aussi une résolution définitive
Tous deux se trouvent maintenant
Plus près de Gouh-gah
Ses mains se dérobent sous lui
Ils s’embrassent
Ils avancent vers le centre de la scène
Le son de tambour retentit juste en ce moment
Tantôt ils se dispersent
Tantôt ils se rassemblent
C’est une garde d’honneur
Ils tournent encore autour de la scène
Pour s’asseoir sur la valise
Nous avons fouillé partout et partout
Ce n’est plus à notre portée
Il faudrait bien réfléchir
Il vaut mieux imiter des professeurs distingués
Idiots que vous êtes !
Vous n’avez pas fouillé là où il le fallait
Si nous avons fouillé dans tous les coins
Ce n’est pas ma faute
Même si j’ai omis de fouiller ailleurs
C’est la même chose pour toi
Gouh-gah tu ne portes toujours dans ta poche
Qu’un manuel
C’est vrai Gouh-gah portait toujours
Le manuel de la loi et de la philosophie
L’un dans la poche droite et l’autre dans la gauche
J’ai bien vu cela
Non tu as tort
La vérité se trouve à côté de nous
Ah ce mot aussi se trouve dans le manuel
Silence
Et bien écoute …
C’en est assez du discours du manuel
Non ce n’est pas cela
Mah-gah et Houh-gah rient face à face
Allons ailleurs pour parler
Qu’as-tu donc ?
Suivez-moi s’il vous plaît
Gouh-gah emmène les deux autres
Derrière la scène
Il chuchote quelques mots à leurs oreilles
Tu comprends toi ?
Tous deux hochent la tête
Gouh-gah en désignant la gauche
Mah-gah toi tourne par là
Et désignant de nouveau la droite
Houh-gah toi tourne de ce côté
Moi j’irai tout droit
Attention et ne perds pas courage
N’aie plus de peur
Es-tu prêt ?
Ils hochent cette fois la tête
Alors c’est le moment de commencer
Tous trois s’approchent de la valise
Tout doucement
A chaque pas sonne
Le son funeste du tombeau
Ils sont rassemblés autour de la valise
Ils sont prêts à attaquer
Gouh-gah va ouvrir la valise
La scène devient obscure tout d’un coup
Et la lumière les prend dans un cercle
Ils prennent tous des choses dans la valise
Mah-gah en retire des vêtements pour homme
Houh-gah en tire des vêtements pour femme
Celui-ci se masque et cherche un porte-à-chefs
Ils éclatent de rire en bondissant de joie
Ils tournent en rond en piétinant
Ils accélèrent de plus en plus vite
Ils tombent par terre hors de zone lumineuse
Silence
La scène s’éclaircit de nouveau
L’un deux se relève d’un air curieux
L’autre demande : penses-tu ?
Oui c’est ça
J’étais vraiment essoufflé l’autre jour
Moi aussi
Moi aussi
C’est que nous l’avons entièrement supprimé
Non nous ne l’avons pas supprimé
Il s’est sauvé
Après s’être déshabillé
Quand même c’est la même chose
Il n’y a même pas de coins pour se cacher
Fuyons ! nous l’avons chassé
Mais s’il revient qu’en diras-tu ?
Nous aurions dû supprimer la possibilité même de son retour
La possibilité implique aussi l’impossibilité même
Quel soin superflu ! t’en fais pas !
Gouh-gah a raison
Uniquement grâce à lui
Nous serons joyeux jusqu’au bout
Il n’y a pas d’invasion
Ni cabale discrète
Ni dessous de l’affaire
Rien du tout
Les trois se serrent la main
Bravo ! bravo ! bravo !
Ils lèvent les bras très en haut
Dis donc
Essayons de mettre ce vêtement
Bonne idée !
Si jamais il revient
Il ne pourra pas nous reconnaître
Et comment mettre ça ?
Idiot mets-le comme je le fais
Après avoir feint de mettre le vêtement
Il dit oh Gouh-gah toi
Tu lui diras comment le mettre
Oui c’est moi qui vais essayer
Fais comme je te montre
Enlève d’abord la veste
Ah c’est un chemisier pour femme boutonnée derrière
Mah-gah essaye lui aussi
Il met les vêtements à l’envers
Gouh-gah boutonne d’abord la veste de Houh-gah
Et ensuite celle de Mah-gah
Houh-gah met la jupe
Mah-gah observe l’homme de Houh-gah
Essayant de mettre le pantalon
Et il manque de mettre les deux pieds dans la même jambe
Il trébuche
Il tombe
Il se lève pour essayer encore une fois
Houh-gah et Gouh-gah le soutiennent
Pour qu’il mette le pantalon correctement
Cette fois les boutons se trouvent du côté du dos
Ca c’est assez drôle
C’est bien quand même
Est-ce vraiment bien mis?
Il l’examine de tous côtés
Ça te va bien ?
Mais tu n’as pas de vêtements
Oui c’est vrai
Pas de problème cela te servira
Gouh-gah se masque
Ca va bien comme ça ?
Gouh-gah gémit de douleur tout à coup
Tous deux tombent de frayeur
Il se déshabille et demande comment il est
Ils se lèvent et disent qu’il est beau
Il leur dit en montrant le porte-à-chefs
Que c’est fort utilisable
On peut ouvrir n’importe quelle porte avec ça
Demande-le-moi si tu en as besoin !
Ah oui d’accord
Il a dû se dépêcher
Il a laissé tomber ça
Montre-le-moi !
Non demande-le-moi quand tu en as besoin
Ma femme sera fort contente si je le lui donne
Peut-être elle ne pourra pas dormir tellement elle sera heureuse
C’est pareil pour moi
Mah-gah s’est laissé prendre par une pensée
Houh-gah aussi s’est laissé en traîner par une pensée
La vitesse de la locomotive ralentit peu à peu
On est arrivé à la gare-baraque
On arrivera bientôt au pays natal
Enfin nous reviendrons à nous-mêmes
Mais il y a encore d’autres gares-baraques
Comment ? idiot !
En leur montrant encore le porte-à-chefs
T’es devenu complètement fou pour ça
Tu te passionnes aussi pour ces vêtements
Déshabille-toi vite !
Je veux les donner à ma femme
Je n’ai pas de vêtements de bonne qualité
Je vais donc les mettre moi-même
Fort bien donnez toutes ces clefs
A qui voudra se déshabiller
Houh-gah examine l’humeur de Mah-gah
Mah-gah épie nos propres réactions de nous-mêmes
Tu ne veux pas ça ?
Il élève en haut le porte-à-chefs
Houh-gah tend la main
Mah-gah lui aussi
Gouh-gah élève la main plus haut
Je veux le donner à celui qui se déshabille le premier`
Bientôt le train s’est arrêté
C’est là la gare provisoire
La prochaine c’est notre pays natal
Les deux reculent à la dérobée
Jusqu'au portail de fer pour y s’appuyer
Ils font un même geste
Ils regardent Gouh-gah hostilement
Je vous dis pour la dernière fois
Que je promets de donner ce porte-clefs
A qui voudra se déshabiller
Les deux types ouvrent vite le portail
Non ! Non ! Non ! Non !
Je dois marcher pieds nus
Je vais marcher moi aussi vers le pays natal
Sans souliers
Ils sautent dehors
Gouh-gah s’affaisse sans force
Les deux bras ballant faiblement
Gouh-gah se révolte en vain
Soudain qu’il se dirige vers les voyeurs
Mesdames et messieurs !
Les deux criminels échappés seront arrêtés
Cadenassés par la police
Ils seront torturés à l’électricité
Ils seront suspendus à l’envers
Leurs jambes et reins seront cassés
Enfin ils seront incapables d’érection
Peut-être ils auront des trous au cœur en fuyant
Ils s’évaderont en suivant la voie ferrée
Ne connaissant ni allée ni sentier pour la traverser
Peut-être les roues du train les écraseront-ils
Ah quelle mort insignifiante !
Qui d’entre vous voudra aller au pays natal avec moi ?
La place est vaste
On y arrivera comme ça plus vite qu’en marchant
On fera un beau rêve non ?
Il s’approche d’une femme
Madame où est-ce que vous allez ?
Il dit en montrant le porte-à-chefs
On peut ouvrir n’importe quelle porte avec ça
Et puis en montrant le masque
On peut se cacher complètement la figure
Voulez-vous y aller avec moi ?
Quand on arrivera à la patrie
Votre femme reviendra à elle
Voulez-vous… ?
Pas de réponse
Pauvre homme découragé
Il se dégage de la salle du théâtre
Pour monter de nouveau sur la scène
Il dit en se tournant vers la salle
Vous avez laissé passer la dernière chance
Cette chance si rare
Finalement il tombe par terre
Le sentiment de solitude le saisit
Il se débat de douleur
Il se lève tout à coup pour se masquer
Il commence à danser
Juste à ce moment-là
Des spectateurs montent sur la scène
Un à un ou deux par deux
Ils se mettent à danser avec lui
La scène est bientôt remplie de spectateurs
La danse festive atteint son paroxysme
Et ils tombent tous ensemble
La scène sombre alors soudainement dans la nuit
Un moment après
Une lampe de poche éclaire la scène
C’est un contrôleur de train
Il aperçoit la valise ouverte
Et illumine les quatre coins de la salle
Mais il ne découvre pas
Ceux qui se sont abattus là
Il ferme la valise
Il la dépose où elle était avant
Il se retire après avoir éclairé la scène
Le portail de fer se clôt en grinçant
La locomotive se met doucement en route
Les sifflets atteignent leur apogée
En harmonie avec l’annonce
Qui frappait leurs oreilles au commencement
Avant-propos
Ce recueil de poésie est fondée sur S+7(substantif + septième de Harmonie) de Jean Lescure et sémiotique d'Algirdas Julien Greimas. Par conséquent elle est également sur Phoria avec Aporia. C'est-à-dire, c'est poésie de la valence qui est interaction d'induction avec la déduction, et de perception avec la catégorie thymique. Il est comme le minimalisme ou l'OuLiPo. Cette action discursive est montrée sur la mise en scène, il sera interprétée globalement par des lecteurs.
Gueune-ok JOUH
Gueune-Ok JOUH, né en Corée, a fait ses études à l’Université de Chung-Nam et soutenu une thèse de doctorat: L’étude de la modernité dans la poésie moderne coréenne, à l’Université de Daejeon. Il est reconnu surtout comme poète qui recherche la possibilité de la nouvelle poésie épique. Il a publié de nombreux recueils de poèmes: Le crépuscule sur le dos, Le tonnerre et la rose et Pour désherber. Il a été instructeur de l'Université de Daejeon.
Jai-Yong SONG, traducteur de Sur les roues et Sur le pont de Gueune-Ok JOUH, a fait ses études de langue et littérature françaises à l’Université de Séoul et soutenu une thèse de doctorat à l’Université Paul Valéry Montpellier III. Ses travaux principaux portent sur les recherches de la critique littéraire française. Il a traduit également en coréen de nombreux ouvrages littéraires françaises, notamment de Hugo, Apollinaire, Breton, Maurois, etc. Il est professeur honoré à l’université de Chung-Nam.
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